Situations de crise humanitaire

Dernière modification: September 14, 2012

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Les options
Les options

Les femmes et les filles sont plus exposées aux différentes formes de violence en situations de conflit, de crise humanitaire et d’urgence ou de crise (notamment pendant ou au lendemain de catastrophes naturelles ou de conflits armés), avec un nombre souvent accru d’incidents d’agression sexuelle et de viol, d’exploitation, de maltraitance et de traite, et de violence familiale. Outre le risque plus élevé de violence, les perturbations dans les services de sécurité, de santé, judiciaires et sociaux de base en situations d’urgence et de crise humanitaire renforcent l’importance des options d’un hébergement sûr pour les femmes et les jeunes filles. Cela est essentiel pour toutes celles qui restent dans leurs communautés d’origine ou sont déplacées vers une autre destination.

La création d’abris pour les femmes dans des situations de crise humanitaire est sensiblement différente de la création d’abris dans d’autres cas, et les programmes devront mettre l’accent sur la prévention de la violence sexuelle à l’égard des femmes ainsi que la protection des survivants de mauvais traitements.

Les services d’hébergement en situations de crise humanitaire et d’urgence visent, entre autres, à:

  • Encourager la création d’habitations et de logements communautaires sûrs, qui peuvent être fournis par des parents éloignés, des bénévoles ou des responsables communautaires susceptibles d’apporter leur soutien aux victimes de la violence. À l’instar d’autres initiatives en matière d’hébergement sécuritaire, la planification et les mesures de sécurité devraient être élaborées avant de rendre ces options d’hébergement opérationnelles pour minimiser les risques de préjudice pour les victimes et leurs familles d’accueil.
  • Créer des espaces sécuritaires réservés aux femmes et, si possible, aux filles, qui offrent un accès confidentiel et anonyme aux services (notamment les services de santé de base), et permettent aux femmes de se rencontrer, de partager leurs expériences et de soulever leurs préoccupations avec le personnel et entre elles. De tels espaces pourraient également envisager d’accueillir d’autres groupes marginalisés susceptibles d’êtres confrontés à des risques accrus de violence sexiste (par ex. les personnes transgenres).
  • Fournir et faciliter l’accès aux services communautaires de soutien psychologique et social offerts dans les centres pour les femmes ou autres installations sécuritaires qui peuvent être utilisés comme lieux de rencontre, de conseil, de formation professionnelle et autres activités.
  • Réserver des espaces d’urgence permettant aux femmes et aux filles de recevoir une protection contre une menace imminente de violence (qui pourraient ou non offrir l’hébergement).
  • Aider les femmes exposées à la violence et les victimes de la violence à prévoir un plan de sécurité et à obtenir une protection adaptée en l’absence d’un tel plan.
  • Tant qu’il n’existe que peu de directives propres aux centres d’hébergement pour les femmes en situation de crise humanitaire, il conviendrait d’envisager l’élaboration de directives pour des structures d’habitation provisoires ou permanentes dans le cadre de la conception et l’aménagement des abris. 

Pour offrir la plus grande sécurité et protection contre la violence (notamment, mais pas exclusivement, la violence et l’exploitation sexuelles) aux femmes qui vivent dans des structures d’habitation provisoires ou permanentes, les organisations devront:

  • Examiner et plaider pour des critères d’éligibilité à l’aide à l’hébergement clairs, cohérents et transparents, qui ne soient pas discriminatoires envers les victimes de la violence et des femmes qui cherchent un logement sans un parent de sexe masculin. Les critères devraient également favoriser les femmes marginalisées qui risquent d’être plus exposées à la violence et à l’exploitation, telles que les femmes chefs de famille, les femmes handicapées, les femmes âgées, les femmes illetrées ou les jeunes femmes non-accompagnées, de sorte qu’elles ne soient isolées et reçoivent un logement dans des lieux sûrs. Ainsi, les organismes chargés de l’attribution de logements provisoires ou transitoires pourraient réserver des emplacements pour des groupes vulnérables dans des quartiers centraux, à proximité des prestataires de services de sécurité et d’autres services.  
  • Mettre en oeuvre des processus pour définir l’accès au logement individuel pour les femmes, et aux abris communaux et foyers d’accueil pour les filles non-accompagnées. Ces processus peuvent s’appuyer sur des données démographiques recueillies à partir des activités d’enregistrement ou par une collaboration avec des prestataires de services spécialisés qui travaillent avec des groupes vulnérables.
  • Solliciter l’avis des femmes et d’autres groupes vulnérables de façon continue pour identifier les problèmes et s’assurer que leurs besoins et préoccupations sécuritaires sont satisfaits. Les femmes devraient être pleinement impliquées et intégrées dans les processus de gestion des camps, en particulier l’évaluation des centres d’hébergement et les comités de gestion, le cas échéant
  • Fournir un espace et des matérieux de construction suffisants et adaptés pour assurer l’intimité et installer des cloisons entre les familles, notamment là où des ménages dirigés par des femmes jouxtent des ménages qui comptent des hommes. Idéalement, des dispositifs de sécurité comme des serrures de porte devraient être fournis dans la mesure du possible.
  • Faire en sorte que l’habitation individuelle des femmes ne compromette pas leur sécurité (par ex. un endroit séparé pour les femmes  célibataires peut dans certains cas s’avérer protecteur alors que dans d’autres peut les exposer à des dangers). Les risques devraient être évalués en fonction du contexte en utilisant les directives disponibles dans Évaluation et suivi.
  • Évaluer, suivre et promouvoir régulièrement la sécurité de l’hébergement, la protection et les réponses aux enjeux émergents, en consultant des femmes bénéficiaires et des groupes de femmes et autres responsables chargés des services de protection et de soutien. Cela peut comprendre des groupes de coordination de la lutte contre la violence envers les femmes (ex. le groupe interinstitutions de travail sur la violence sexiste ou groupe de protection, là où il y a une présence des Nations Unies).

Des mesures particulières à envisager en matière d’emplacement et d’infrastructure et de configuration physique d’un espace d’hébergement comprennent:

  • Des consultations avec des femmes sur les décisions concernant l’emplacement des abris d’urgence, leur configuration et les matérieux utilisés, les modalités de construction et de préservation des logements provisoires, entre autres questions.
  • Le choix comme site d’un endroit qui offre un espace de repos suffisant pour le nombre prévu des femmes susceptibles de bénéficier d’un soutien sans que cela pose des risques supplémentaires de sécurité et de protection. Cela devra être établi en coopération avec des femmes, et dans le cadre d’un comité plus vaste de fournisseurs d’hébergement.
  • L’examen des risques particuliers que pose le milieu environnant du site, comme la proximité des frontières et le danger lié à des attaques transfrontalières ou à la distance par rapport aux points de collecte alimentaire et d’eau, le cas échéant, la proximité ou l’accessibilité du site au personnel sécuritaire de confiance.  
  • L’emplacement du centre d’hébergement devrait éviter l’isolement, encourager le sens communautaire et renforcer la protection collective, tout en préservant l’intimité des femmes et de leurs enfants. Il faudrait prévoir une partie commune où les enfants peuvent jouer sous la surveillance en toute sécurité de leurs mères ou gardiens. 
  • L’installation d’un éclairage dans les parties communes et pour usage personnel (par ex. latrines bien éclairées et torches pour les femmes et les familles).

L’action et la collaboration plurisectorielles coordonnées dans la répartition des ressources et la fourniture des services sont essentielles pour la protection en situation d’urgence en raison de la nécessité d’établir et de mettre en oeuvre rapidement différents services spécialisés (ex. assainissement et eau, santé et éducation, hébergement sûr). Le but de la coordination dans ces situations est de fournir des services accessibles, rapides, confidentiels et adaptés, notamment en matière de santé, sociale, juridique, de défense des droits de l’homme et de sécurité aux victimes de la violence et d’établir des mécanismes de prévention des incidents de violence sexuelle.

Les prestataires de services qui aident les survivants devraient participer à des réunions régulières avec le groupe de coordination des activités de l’abri et des groupes de travail sur la violence sexiste, favorisant leur création s’ils n’existent pas. Les fournisseurs d’hébergement devraient informer les groupes de cooordination des réalisations et des difficultés rencontrées dans la fourniture d’hébergements sûrs aux femmes et aux filles, et participer aux activités dirigées par les organismes de coordination du travail sur la violence sexiste. Cela devrait comprendre la mise en place de processus de partage de l’information pour faciliter la communication entre organisations et l’inscription des femmes et des filles qui se présentent sur le site d’hébergement. Ainsi, les résultats provenant d’une analyse rapide et coordonnée de la situation peuvent être utilisés pour l’aménagement d’hébergements sûrs et de programmes. Lors de l’inscription des femmes et des filles sur le site d’hébergement, celles en particulier qui nécessitent un hébergement sûr et une assistance devraient être identifiées et recevoir un logement sécuritaire (par ex. celles qui sont les plus exposées à la violence sexuelle).

Haut Commissariat de l’ONU aux réfugiés, 2003; Équipe spéciale du Comité permanent interorganisations (IASC) chargée de la sexospécificité dans l’assistance humanitaire, 2005;  IASC, 2006; Conseil norvégien des réfugiés (NRC), 2008; et Ward/GBV Area of Responsibility (2010). 

 

Exemple: Safe Houses en Haïti

Répondant à la demande croissante de soutien pour les victimes de violence sexiste, six refuges ont été créés dans cinq régions en Haïti en 2011, avec l'appui de l'ONU-Femmes, le Ministère de la Condition et l'homme (MCFDF) des femmes, et les organisations V-jour et Zonta International.

Les maisons comprennent Myriam Merlet Safe House au Cap-Haïtien, et deux autres gérés par l'Association Femmes Soleil d'Haïti, qui fournissent des services dans les régions du Nord-Est, Nord-Ouest et. Deux maisons dans l'Ouest, géré par le ministère et l'organisation Kay Fanm, a été en cours de reconstruction après le séisme Janvier 2010. Un sixième maison du réseau dans la région du Sud-Est sera achevée en 2012, géré par l'organisation haïtienne Fanm Deside. Les maisons d'hébergement offrent une formation pour les praticiens et les conseillers, ainsi que le mentorat et la supervision clinique.

Le ministère de la Condition et droits de la femme a également fourni un soutien en établissant des procédures opérationnelles standard et un manuel de normes pour les maisons sûres. La collaboration avec le ministère est cruciale, car elle réglemente les services fournis aux femmes et aux filles dans les maisons d'hébergement au niveau national. Cibler les maisons d'hébergement, les praticiens, les conseillers et les gestionnaires, les lignes directrices seront publiées par le ministère pour soutenir leur mise en œuvre systématique, grâce à la certification pour les maisons sûres et contrôle de la qualité des services.

La maison sûre ministère fonctionnant a été transformé en un centre de formation pour soutenir le développement des capacités des futurs praticiens, renforcer les liens et le partenariat entre le gouvernement et les organisations de femmes. Ces formations sont essentielles pour assurer que toutes les femmes, peu importe où elle vit, un accès égal à des services de qualité, y compris des conseils, des services médicaux, la police et la justice.

(Adapté de: ONU Femmes 2012 Safe Houses apporter un soutien précieux aux victimes de violence en Haïti.)

  

Outils:

Shelter: Gender Market Tip Sheet: Gender Equality in the Project Sheet (Comité permanent interorganisations - IASC, 2010).  Cet outil fournit des exemples et des suggestions permettant aux réalisateurs de programme de prendre dûment en considération la sexospécificité  dans la conception, la mise en oeuvre et le suivi d’un programme en matière d’hébergement, qui pourra ensuite s’adapter pour se concentrer sur la problématique de la violence sexiste. Disponible en anglais.

Collective Centre Guidelines (Haut Commissariat des Nations Unies aux réfugiés et Organisation internationale pour les migrations, 2010). Ces directives offrent des suggestions pour la planification de programmes des centres d’accueil, en particulier les facteurs de risques liés à la violence sexiste et les stratégies visant à les éliminer. Disponible en anglais.

Camp Management Toolkit, Chapter 10: Prevention of and Response to Gender-Based Violence (Conseil norvégien des réfugiés, 2008). Disponible en anglais.

Guidelines for Gender-Based Violence Interventions in Humanitarian Settings. Shelter and Site Planning in Emergency Settings (IASC, 2005). Cet outil fournit des directives détaillées pour la coordination, l’aménagement et la création d’abris et de services d’hébergement dans des situations d’urgence comme les  conflits armés. Cela comprend des mesures nécessaires pour évaluer la sécurité et définir des stratégies de protection (Assess Security and Define Protection Strategy; Provide Security in Accordance with Needs, et des sections sur la coordination et la planification des sites d’hébergement (Coordination and Shelter and Site Planning). Disponible en anglais.  

Sexual and Gender-Based Violence Against Refugees, Returnees and Internally Displaced Persons. Guidelines for Prevention and Response (Haut Commissariat des Nations Unies aux réfugiés, 2003). Ce guide s’adresse au personnel des institutions de l’ONU, aux organisations intergouvernementales et non gouvernementales, aux réfugiés et aux organismes gouvernementaux d’accueil qui offrent une protection et une aide aux réfugiés et autres personnes concernées. Le guide examine les causes et les facteurs profonds qui contribuent à la violence sexuelle et sexiste et fournit un cadre d’actions concrètes pour l’élaboration de stratégies efficaces de prévention et d’intervention. Disponible en anglais, arabe, espagnol, fraçias, roumain, russe et swahili.