Droits des victimes

Dernière modification: February 26, 2011

Ce contenu est disponible dans

Les options
Les options

 Au nombre des victimes peuvent figurer la personne directement visée par le crime « d’honneur » ainsi que sa famille proche. Voir : Principes fondamentaux et directives concernant le droit à un recours et à réparation des victimes de violations flagrantes du droit international des droits de l’homme et de violations graves du droit international humanitaire, § 8. Toutefois, lors de la rédaction de dispositions relatives aux droits des victimes de violences commises au nom de « l’honneur », il convient de tenir compte du fait que des proches peuvent être les auteurs ou complices du délit. La loi doit énoncer clairement que, aux fins de la présente partie, est exclue des victimes toute personne ayant perpétré, autorisé, favorisé, encouragé ou sollicité d’une autre façon des violences au nom de « l’honneur », quelles que soient ses relations avec la victime.

Le législateur doit incorporer dans la loi le financement de services d’assistance complets et intégrés au profit des victimes de crimes « d’honneur ». La Résolution 1681 de l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe (2009) recommande aux États de procurer aux victimes des lieux géographiquement accessibles où ils puissent trouver refuge, de mettre en place des programmes de soutien physique et psychologique de longue durée, de les aider à acquérir une autonomie financière, et de leur fournir une protection policière ainsi qu’une nouvelle identité, le cas échéant. Les éléments suivants doivent être inclus dans les dispositions prévoyant une assistance aux victimes :

  • Une permanence téléphonique gratuite fonctionnant 24 heures sur 24, accessible depuis tout le territoire national, offrant une assistance dans plusieurs langues, et tenue par des personnes formées à la problématique des crimes « d’honneur ». Voir : Centres d’accueil d’urgence et permanences téléphoniques (en anglais), StopVAW.

 

Pratique encourageante : la permanence téléphonique Allochtone Vrouwentelefoon Oost Nederland apporte une assistance aux immigrées. Le numéro est gratuit, non identifiable sur les relevés de téléphone, et les bénévoles du centre d’écoute parlent au total dix langues. Voir : Honour Related Violence: European Resource Book and Good Practice (Violences au nom de « l’honneur » : recueil de ressources et de bonnes pratiques européennes), Kvinnoforum, 2005, p. 127. 

 

  • Un foyer pour 10 000 habitants, en zone rurale comme en milieu urbain, procurant un hébergement d’urgence pour les victimes et leurs enfants, et pouvant les aider à trouver un logement durable. Voir : Foyers et refuges (en anglais), StopVAW. La décision de loger dans un foyer doit toujours être prise par la victime. Le législateur doit être conscient que les foyers peuvent ne pas accueillir les mineures de moins de 18 ans, et doit prévoir des hébergements spéciaux pour les jeunes filles exposées à un risque de crime « d’honneur ». Les politiques et hébergements d’accueil doivent prendre en considération les besoins particuliers des femmes et des filles immigrées.

ÉTUDE DE CAS : en l’absence de foyers, certains États incarcèrent les victimes dans des prisons pour les protéger contre des crimes « d’honneur ». En Jordanie, il n’existe pas de foyers pour les victimes de crimes « d’honneur », et les autorités les placent souvent en détention au Centre de correction et réadaptation de Jweideh. Voir : Rapport du département d’État américain sur la situation des droits de l’homme : Jordanie (2008, en anglais). Dans l’intérêt de la sécurité publique, un directeur de prison peut maintenir toute personne en détention, sans aucune procédure, une pratique régulièrement appliquée aux femmes exposées à un risque de violences au nom de « l’honneur ». Dès lors qu’une femme est détenue sur ordre du directeur de la prison, elle ne peut être relâchée qu’avec l’autorisation de ce directeur – qu’il donne en général seulement lorsqu’il estime qu’elle peut partir en toute sécurité et qu’un parent de sexe masculin en prend la responsabilité. Voir : Human Rights Watch, Les meurtriers à l’honneur : pas de justice pour les victimes de crimes « d’honneur » en Jordanie (en anglais), 2004, p. 24-27.

Le législateur doit abroger toute loi ou ordonnance qui autorise la détention de femmes victimes de violence, prévoir des moyens suffisants pour fournir des foyers et arrêter les auteurs des crimes « d’honneur » au lieu de leurs victimes. Les centres créés pour accueillir les victimes de violence familiale doivent aussi avoir l’obligation de recevoir et d’aider les victimes de violences commises au nom de « l’honneur ». Il convient d’adopter des lois ordonnant la libération immédiate des victimes de crimes « d’honneur » ayant été détenues sans inculpation, sans procédure légale ni examen ; abroger les lois qui conditionnent la libération d’une femme à sa prise en charge par son mari ou un parent de sexe masculin ; et, à leur libération, assurer la protection entière des victimes et faciliter le placement volontaire dans un foyer pour les femmes victimes de violence si elles le souhaitent.

  • Un centre d’accueil d’urgence pour 50 000 habitants, avec du personnel formé pour apporter un soutien, des conseils juridiques et une aide psychologique d’urgence aux victimes de crimes « d’honneur », y compris des services spécialisés pour des groupes particuliers, comme les immigrantes. Voir : Centres d’accueil d’urgence et permanences téléphoniques (en anglais), StopVAW. Les centres d’accueil d’urgence doivent être préparés et suffisamment formés à s’occuper des victimes avant, pendant et après des crimes « d’honneur ».
  • L’élaboration des normes d’agrément de ces centres d’aide en consultation avec les ONG et les conseillers qui travaillent directement auprès des plaignantes/victimes. 

 

Les structures de soins doivent être équipées pour prendre en charge les blessures particulières des victimes de crimes « d’honneur », comme les brûlures et les défigurations. Les victimes de viols commis au nom de « l’honneur » doivent bénéficier de services et de soutiens appropriés. La législation doit prévoir des centres d’accueil dans lesquels des conseillers formés pourront assurer leur sécurité, leur expliquer leurs droits, parer aux besoins médicaux urgents, obtenir des soins et les orienter vers d’autres services, en toute confidentialité. Voir : Programme de prise en charge des agressions sexuelles (en anglais), StopVAW. Comme pour la violence familiale, il est important que la collectivité tout entière réagisse de façon coordonnée aux crimes « d’honneur ». Voir : Intervention coordonnée d’urgence (en anglais), StopVAW ; le chapitre Les agressions sexuelles ; Bonnes pratiques législatives en matière de violences contre les femmes (en anglais), rapport du Groupe d’experts des Nations Unies, chapitre 6 sur la protection, le soutien et l’aide apportés aux victimes. Il faut mettre au point des directives et protocoles sur la sécurité des hôpitaux et des centres médicaux. Plus précisément, les services de sécurité de ce type d’infrastructures doivent avoir pour rôle d’assurer la sécurité et l’information des patients, et être avertis des problèmes potentiels nécessitant de contrôler les visiteurs, par exemple pour interdire la visite de personnes pouvant être dangereuses pour des victimes hospitalisées. Les services de sécurité doivent travailler en coopération avec le personnel médical et les forces de l’ordre pour assurer la sécurité des victimes dans toutes les zones de l’hôpital, afin d’éviter qu’elles ne subissent de nouvelles violences ou des intimidations de la part de leurs agresseurs.

  • Une aide sous forme d’un hébergement, de vêtements et de nourriture pour les enfants d’une victime d’un crime « d’honneur » dans les foyers décrits plus haut.
  • La création de ces centres d’aide par un organisme gouvernemental, chargé d’établir des directives ou normes générales et de financer tous les services présentés ci-dessus.

 

Pratique encourageante : au Royaume-Uni, la Commission nationale des femmes (en anglais) est une instance nationale qui sert de lien entre le mouvement de défense des droits des femmes et les pouvoirs publics afin de promouvoir l’égalité entre les sexes. La Commission est financée par l’État mais est néanmoins libre d’émettre des avis sur la politique gouvernementale. Elle a créé un Groupe de travail sur la violence à l’égard des femmes (en anglais), comprenant deux sous-groupes, l’un sur la violence sexuelle l’autre sur la violence familiale, dont l’objectif est de :

1. sensibiliser l’opinion publique à la violence dont les femmes sont victimes et entraîner des changements dans les lois, les politiques et les pratiques ;

2. surveiller la mise en œuvre des plans d’action gouvernementaux ;

3. coordonner les avis des membres de la Commission nationale des femmes sur la violence contre les femmes et faire en sorte que ces avis soient transmis aux décideurs ;

4. assurer la liaison avec les autres Groupes de travail de la Commission nationale des femmes sur les thèmes de travail pertinents ;

5. rédiger des rapports sur l’évolution de la situation au niveau national et international ;

6. être en contact avec les services ministériels, les autres instances publiques et les groupes en charge de la politique publique travaillant avec des ONG.

Voir : Manuel ONU, 3.6.1 ; Stratégies et mesures concrètes types relatives à l’élimination de la violence contre les femmes dans le domaine de la prévention du crime et de la justice pénale (en anglais).