Législation

Dans cette base de connaissances, en référence à certaines dispositions ou articles de la loi, dans un jugement ou aspects d'une pratique ne signifie pas que la loi, le jugement ou la pratique réputée en pleine un bon exemple ou une pratique prometteuse.

Certaines des lois mentionnés dans ce document peuvent contenir des dispositions autorisant la peine de mort. Tenant compte des résolutions 62/149, 63/168, 65/206 et 67/176 de l'Assemblée générale des Nations Unies, appelant à la mise en place d'un moratoire sur la peine de mort et son abolition définitive, la peine mort ne devrait pas être inclus dans les dispositions sur les peines pour les crimes de violence contre les femmes et les filles.

Autres Dispositions Relatives aux Lois sur la Violence Familiale Outils
Le harcèlement sexuel dans le sport Outils
Dispositions relatives à l’immigration Resources for developing legislation on sex trafficking of women and girls

Le fait d'ériger les pratiques néfastes en infraction pénale peut avoir un effet dissuasif non négligeable. Dans de nombreux pays où sévissent les pratiques analysées dans le présent module, celles-ci ne sont pas inscrites au Code pénal ou ne le sont que depuis peu.

Lors de la criminalisation des pratiques néfastes, il est important de prendre en compte les questions suivantes :

  • La force publique dispose-t-elle de ressources et de moyens suffisants pour mettre en œuvre les nouvelles lois pénales de façon adaptée ? Dans le cas contraire, comment est-il possible d'y remédier ?
  • Les lois coutumières soutiennent-elles cette législation ou sont-elles contradictoires ? En cas de contradiction, il convient de se référer au chapitre ci-dessus sur l’abrogation des dispositions contradictoires des lois coutumières et religieuses et de veiller à ce que la nouvelle législation fasse clairement état de la primauté des dispositions de la constitution ou du droit national.
  • Une campagne de sensibilisation a-t-elle été menée auprès de la population afin de lui faire prendre conscience des conséquences préjudiciables de ces pratiques, de la nécessité d'y renoncer et du fait qu'elles constitueront une infraction au titre des nouvelles lois ?
  • L’idée de permettre aux victimes d'engager des poursuites contre des membres de leur entourage susceptibles de s'être rendus coupables de pratiques néfastes est-elle acceptée par la société ?
  • La mise en application d'une loi pénale affecterait-elle de façon disproportionnée et/ou isolerait-elle un groupe ethnique particulier ?
  • La manière dont la nouvelle infraction pénale sera mise en œuvre tiendra-t-elle compte de l'intérêt supérieur de la fillette ? Ce point est d'autant plus important que de nombreuses pratiques néfastes, comme les mutilations génitales féminines ou le « repassage » des seins, sont perpétrées par les parents de la victime ou par les personnes s'occupant de celle-ci, ou avec leur soutien, et que des sanctions pénales telles que de lourdes peines d'emprisonnement risqueraient de nuire considérablement à l'intérêt de l'enfant victime.
  • Il est possible d'ériger les pratiques néfastes en infraction par l’adoption d’une loi interdisant expressément ces pratiques, comme le Sénégal l'a fait pour les mutilations génitales féminines, ou en recourant à des dispositions générales du droit pénal qui sanctionnent diverses actions dont les pratiques néfastes, comme dans le cas de la France avec les mutilations génitales féminines. Les États retenant cette dernière option doivent tout particulièrement s'efforcer de sensibiliser l'opinion sur le fait que des pratiques jadis légales risquent désormais de donner lieu à des poursuites pénales.

    Dans tous les cas, la législation érigeant en infraction des pratiques préjudiciables spécifiques ne devrait être adoptée que dans le cadre d'une stratégie gouvernementale globale visant à modifier les usages locaux et les croyances individuelles qui sous-tendent ces pratiques si profondément enracinées.

    GénéralitésObservations générales relatives aux sanctions Définition claire des pratiques néfastes Extraterritorialité et extraditionCirconstances atténuantesConsentement

    Qu’une pratique préjudiciable soit érigée ou non en infraction, la législation s’y rapportant doit reposer sur une approche globale axée sur les droits fondamentaux de l’être humain. Elle doit veiller à ce que soient poursuivis en justice et sanctionnés les auteurs de pratiques néfastes, mais aussi intégrer « la prévention de la violence, le renforcement du pouvoir d’action, le soutien et la protection de la victime, ainsi que la mise en place de mécanismes assurant l’application effective de ses dispositions ». Voir : Bonnes pratiques législatives en matière de « pratiques néfastes » à l’égard des femmes (en anglais), rapport du Groupe d’experts des Nations Unies, reprenant le Rapport de la réunion du Groupe d'experts des Nations Unies sur les bonnes pratiques législatives en matière de violences contre les femmes (en anglais).

     

    Pour garantir, outre leur condamnation, la prévention des pratiques néfastes, la loi doit instaurer d’autres mesures de protection et voies de recours civiles.

    Généralités et Ordonnances de protectionProcès civils Interdiction de recourir aux mécanismes traditionnels de règlement des différends qui sont préjudiciablesRéparationDispositions relatives à la protection de l’enfanceLois relatives à l’immigration et à l’asile
    les services aux victimesSensibilisation et éducation du grand public Outils
    Dispositions relatives à la protection des enfants Resources on Forced and Child Marriage
    Définition claire et précise des mutilations gébitales féminines Outils
    Définition et formes de la maltraitance des veuves Autres dispositions relatives à la mal traitance des veuves Outils

    Les ordonnances de protection

    Le législateur doit prévoir la possibilité de rendre des ordonnances de protection pour les victimes de violences liées à la dot ou intégrer cette forme de violence dans un cadre relatif à la violence familiale permettant ce type de recours. De nombreux États ont prévu dans leur droit pénal et civil la possibilité de rendre des ordonnances de protection pour les plaignantes/survivantes d’actes de violence familiale. Dans le système pénal, une ordonnance de protection, ou injonction d’éloignement, peut offrir un recours similaire à l’ordonnance civile de protection. L’injonction d’éloignement peut être décidée dans le cadre d’une procédure pénale lorsqu’un auteur de violence est accusé d’une infraction pénale. (Voir par exemple la Loi du Minnesota, États-Unis, sur la violence familiale § 518B.01 (22) (1979, en anglais).)

     

    Pratique encourageante : en plus d’adopter une loi spécifique sur la dot, l’Inde a intégré les violences liées aux demandes de dot illégales dans sa définition de la violence familiale et offre la possibilité de rendre des ordonnances de protection. Voir http://www.apwld.org/pdf/India_ProtectionDVact05.pdf (en anglais). Au Pakistan, une précédente version du projet de loi sur la violence familiale classait les demandes de dot au rang des violences familiales en les définissant comme le fait de « harceler, maltraiter, blesser ou mettre en danger une personne dans l’objectif de la contraindre, ou de contraindre un de ses proches, à satisfaire une demande illégale de dot ou de tout autre bien ou valeur mobilière ». Voir : Les meilleures dispositions législatives pour combattre les pratiques néfastes contre les femmes au Pakistan (en anglais), p. 11 (note 22). Cependant, la dernière version de la loi pakistanaise sur la violence familiale (en anglais) ne fait plus référence aux demandes de dot. De son côté, la Loi du Bangladesh sur la prévention de l’oppression contre les femmes et les enfants (2000, en anglais) comprend des dispositions sur les assassinats liés à la dot, mais ne traite pas de la question des ordonnances de protection.  Le législateur doit inclure la violence et le harcèlement liés aux demandes de dot dans la définition de la violence familiale. Voir la section sur la définition des violences liées à la dot.

     

    Les ordonnances civiles de protection peuvent prendre la forme d’ordonnances d’urgence ou d’ordonnances sur requête (décision provisoire prise sans en référer à la partie adverse), valables pour un temps limité, ou d’ordonnances de protection pour une durée plus longue sur demande de la plaignante/survivante. Ces ordonnances de longue durée peuvent nécessiter une audience approfondie devant un juge en présence de la partie adverse. Adoptée il y a plus de 30 ans, la Loi du Minnesota sur la violence familiale, § 518B.01 (4) (1979, en anglais) a été l’une des premières lois au monde sur les ordonnances de protection. Cette forme de recours s’est avérée être l’une des plus efficaces dans les affaires de violence familiale. Voir : Les ordonnances de protection (en anglais), StopVAW, The Advocates for Human Rights. Les violences liées à la dot étant une forme de violence familiale, le législateur doit veiller à ce que les plaignantes/survivantes de ce type de violences puissent bénéficier d’une ordonnance de protection.

    Outre l’ordonnance de protection traditionnelle, le législateur doit envisager d’étendre les voies de recours ou d’en créer d’autres tenant compte des mécanismes spécifiques de la violence liée à la dot. Par exemple, la Loi indienne de 2005 permet de rendre des ordonnances de protection en cas de violence familiale et d’aliénation de biens, des ordonnances de résidence limitant l’utilisation du domicile conjugal par l’auteur de violences et ordonnant à ce dernier de fournir à la victime un autre logement, et des ordonnances de garde des enfants et d’indemnisation. Le législateur peut s’inspirer de l’article 19(1) de la loi indienne pour intégrer des dispositions relatives aux ordonnances de résidence dans une loi sur les violences liées à la dot. L’ordonnance de résidence doit permettre au juge : d’interdire au contrevenant d’exproprier la victime du domicile conjugal ou de l’en priver de toute autre manière, quel que soit le droit réel qu’il exerce sur ce domicile ; d’ordonner au contrevenant de quitter le domicile conjugal ; d’interdire au contrevenant ou à tout membre de sa famille de pénétrer dans le domicile conjugal où vit la victime ; d’interdire au contrevenant d’aliéner, d’hypothéquer ou de céder le domicile conjugal ; d’interdire au contrevenant de dénoncer ses obligations à l’égard de ce domicile ; ou d’ordonner au contrevenant de payer à la victime un logement comparable. La loi indienne autorise le magistrat à enjoindre au contrevenant « de rendre à la personne lésée sa dot ou tout autre bien ou valeur mobilière auquel elle a droit » (article 19(8)). La loi doit être rédigée en des termes contraignants afin de faire obligation aux policiers d’exécuter les ordonnances de protection.

     

    ÉTUDE DE CAS : la loi ne doit pas interdire de prononcer des ordonnances de protection contre des femmes. Par exemple, dans l’affaire Smt. Sarita c. Smt. Umrao, 2008 (1) R. Cr. D 97 (Raj), un recours a été déposé aux termes de la loi indienne sur la violence familiale au motif que, comme une femme ne pouvait pas être partie défenderesse, la requête à l’encontre de la belle-mère de la victime devait être retirée. La requérante a fait valoir qu’elle était autorisée à porter plainte contre « les membres de la famille » de son mari et que, comme ce terme ne désignait pas un genre en particulier, sa belle-mère en faisait partie. La haute cour du Rajasthan a conclu que le terme « membre de la famille » était très large et pouvait inclure tous les membres de la famille du mari, y compris les femmes. Dans les affaires Nand Kishor et autres c. État du Rajasthan, MANU/RH/0636/2008, et Rema Devi c. État du Kerala, I (2009) DMC 297, le tribunal a conclu qu’une femme pouvait être partie défenderesse. Voir : Collectif des avocats, Décisions de justice marquantes rendues aux termes de la loi indienne sur la violence familiale (en anglais).

     

    Les ordonnances de protectionLes ordonnances d’urgence ou ordonnances sur requêteContenu des ordonnances d’urgence ou ordonnances sur requêteLes ordonnances de protection après audienceContenu des ordonnances de protection après audienceDispositions relatives aux avertissements, durée des ordonnances de protection et autres dispositions essentielles Dispositions relatives à la garde des enfants dans les ordonnances de protectionDroit de la famille et divorceDroit de garde et autres dispositionsProcès civils pour demander des dommages et intérêtsLes droits des femmes à la propriété et à l’héritage
    Autres dispositions relatives aux lois dus les violences lié.es à la dot de la violence familiale
    Après la campagne : et mainteant ?Ressources pour actions le plaidoyer en faveur de l’adoption de lois nouvelles ou d’une réforme des lois
    Introduction Financement de la mise en œuvre Les employeurs et les syndicats Ressources pour l'application des lois
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    Promouvoir la sécurité d’occupation foncière pour les femmes

    Dernière modification: February 27, 2011

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    Les options
    • L’objectif primordial du législateur doit être de promouvoir l’égalité et la sécurité d’occupation foncière et du logement pour les femmes, y compris les veuves. Dans son Observation générale N° 4, le Comité des droits économiques, sociaux et culturels fait observer qu’il existe différentes formes d’occupation : « la location (par le secteur public ou privé), la copropriété, le bail, la propriété, l’hébergement d’urgence et l’occupation précaire, qu’il s’agisse de terres ou de locaux. Quel que soit le régime d’occupation, chaque personne a droit à un certain degré de sécurité qui garantit la protection légale contre l’expulsion, le harcèlement ou autres menaces ». La FAO (Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture) définit plus précisément la propriété foncière comme « un ensemble de droits qu’une personne ou une organisation possède vis-à-vis d’un fonds. La sécurité de tenure ne se limite pas à la propriété privée mais peut exister sous une grande variété de formes tels les baux sur des terres domaniales ou les droits d’usage de la propriété communale ». La législation et les politiques publiques doivent donc favoriser la sécurité d’occupation pour les femmes, y compris les veuves, comme approche la plus large possible pour aborder les droits fondamentaux d’accès à la terre et au logement, de propriété, d’utilisation et de bail, entre autres. Le fait de garantir la sécurité d’occupation pour les femmes, y compris les veuves, permettra à celles-ci de prendre des décisions sur la meilleure façon d’utiliser la terre pour ses ressources et pour un investissement durable et de l’utiliser de manière plus efficace ; cela leur accordera en outre un meilleur accès à des perspectives économiques.
    • La sécurité d’occupation doit inclure des protections applicables contre l’éviction et les restrictions arbitraires aux droits sur la terre, des voies de recours, une période raisonnable de droits adaptés à l’utilisation de la terre et à l’utilisateur, ainsi que la capacité légale de léguer, donner en location ou attribuer la terre à court ou long terme. Voir ONU-Habitat, Garantir un accès sûr à la terre pour tous (en anglais), 2008. L’occupation prend différentes formes, depuis la pleine propriété qui confère au propriétaire l’ensemble des droits jusqu’aux systèmes d’occupation informelle, comme l’occupation sans titre.

     

    Les femmes comme bénéficiaires directes

    Les politiques publiques doivent reconnaître les femmes comme bénéficiaires directes de la terre sans tenir compte de leur situation matrimoniale. La législation doit accorder aux femmes le droit, à égalité avec les hommes, d’être bénéficiaires directes, que ce soit par une attribution par l’État, par mariage en fonction du régime matrimonial de propriété des biens, par héritage ou par achat. Le législateur doit veiller à ce que les lois reconnaissent le droit des femmes d’administrer des biens et de conclure des contrats. CEDAW, art. 15 (2).

    Réformes graduelles et progressives

    • Le législateur doit prendre conscience du fait que la sécurité d’occupation ne requiert pas automatiquement un titre de propriété et qu’en réalité un titre de propriété individuel n’est pas toujours la meilleure façon de protéger les femmes. Dans certains cas, des titres individuels par opposition à la propriété commune, publique ou collective risquent de réduire les droits actuels des femmes à l’utilisation de la terre à moins que des protections supplémentaires ne soient mises en œuvre. Délivrer des titres de propriété pour des terres non enregistrées peut mettre fin aux autres droits que les femmes ont sur les biens, entraîner une augmentation du prix de la terre et mener à des revendications coûteuses. Voir : ONU-Habitat. Droits des femmes au sol, à la propriété et au logement : guide global pour les politiques publiques, 2007. Par exemple, en Gambie, un programme d’irrigation a remis le contrôle des terres communes aux chefs de famille de sexe masculin. Cette mesure a privé les femmes de leur droit d’usufruit (le droit d’utiliser un bien appartenant à autrui) sur ces biens communs, qu’elles cultivaient pour se nourrir ; leur travail agricole a été détourné pour aider les hommes. Voir Institut international de recherche sur les politiques alimentaires (IFPRI), Approches encourageantes pour répondre aux besoins des travailleuses agricoles pauvres (en anglais), 2008. Une meilleure approche consisterait à attribuer des terres en priorité aux personnes qui les ont exploitées de manière productive, et qui sont souvent des femmes.
    • Plutôt que d’imposer immédiatement et automatiquement un titre de pleine propriété, ONU-Habitat et le FIDA recommandent aux États d’adopter une approche flexible qui corresponde au contexte et aux capacités institutionnelles du pays. Une approche graduelle et à long terme utilise les systèmes fonciers existants et traditionnels comme point de départ pour l’élaboration d’une réforme foncière. Au lieu de créer d’emblée un nouveau système, l’approche graduelle et évolutive utilise différents niveaux d’occupation, qui dépendent de facteurs politiques, sociaux, traditionnels et coutumiers, de ressources institutionnelles et de considérations de genre. Les différentes possibilités sont, parmi d’autres, l’octroi d’un certain niveau de droits d’occupation à des occupants sans autorisation, un titre de propriété individuel, des options de possession intermédiaires, des formes alternatives de propriété et d’occupation, par exemple des coopératives de femmes, le renforcement des droits des femmes à utiliser, occuper et exploiter la terre, l’intégration de la politique foncière à la planification et aux infrastructures, et la régularisation des droits coutumiers et de la construction sur des systèmes fonciers coutumiers. Le législateur doit adopter des mesures pour aborder, contrôler et évaluer les effets de ces projets dans le temps en vue d’élaborer des réformes plus globales à long terme. Voir ONU-Habitat, Garantir un accès sûr à la terre pour tous (en anglais), 2008 ; FIDA, Régime foncier.

    ÉTUDE DE CAS:

    ONU-Habitat a recensé plusieurs exemples de systèmes fonciers comme alternatives au titre de propriété automatique :

    • Le conseil municipal de Nairobi, au Kenya, a créé un système d’autorisations d’occupation temporaire qui distribue des terres publiques aux titulaires de ce document afin qu’ils les exploitent de manière productive. Le titulaire verse un droit annuel de renouvellement de l’autorisation et peut ériger des structures semi-permanentes sur la terre. Les bénéficiaires de ce système utilisent la terre pour des activités produisant des revenus ainsi qu’à des fins résidentielles.
    • Aux Philippines, le président a fait des déclarations protégeant les occupants sans titre de terres publiques contre l’éviction. Cette assurance a eu pour effet bénéfique de motiver les résidents à améliorer leur habitation et leur environnement.
    • La Colombie a adopté des lois qui offrent une série d’options intermédiaires « tremplin » en vue de favoriser un logement durable et accessible, par exemple les « déclarations de possession », les « droits d’achat et de vente pour une utilisation future » et le « bail communal ». Ces options favorisent les droits d’occupation et protègent contre l’éviction. La Colombie dispose également de lois qui contribuent à un niveau de vie décent en l’absence de système foncier officiel ; ces lois permettent à tous les citoyens de bénéficier des services publics de base aussi longtemps qu’ils peuvent prouver qu’ils résident dans les habitations et ont les moyens de payer ces services.

    Voir ONU-Habitat, Garantir un accès sûr à la terre pour tous (en anglais), 2008.

     

    Régimes fonciers coutumiers

    • Le législateur doit se demander s’il convient de formaliser ou d’enregistrer des droits coutumiers sur la terre. Cette décision doit être prise en consultation avec les femmes, les veuves et la société civile et elle doit prendre en considération le contexte actuel. Les avantages de la formalisation d’un système d’enregistrement des droits coutumiers sur la terre sont l’amélioration de la sécurité d’occupation, la détention de documents par les propriétaires à des fins d’obtention de crédit, et la simplification de la planification et de l’administration foncières. D’autre part, l’enregistrement de terres soumises au régime coutumier risque de mettre fin aux droits d’utilisation informelle des femmes, de les exclure de droits futurs en cas de changement de leur situation matrimoniale et de soulever des questions à propos du nom qui doit figurer sur les documents. Les projets qui ne prennent pas en considération les droits coutumiers des femmes sur la terre risquent de « remettre en cause ces droits et d’aliéner les femmes qui cessent souvent de travailler en réaction ». Voir Institut international de recherche sur les politiques alimentaires (IFPRI), Approches encourageantes pour répondre aux besoins des travailleuses agricoles pauvres (en anglais), 2008 ; Katalin Komjathy et Susan E. Nichols, L’accès des femmes à la terre – Lignes directrices de la FIG (en anglais et en russe), Fédération internationale des géomètres.

     

    • Dans certains cas, le législateur peut décider de s’appuyer sur des systèmes coutumiers pour l’élaboration de réformes foncières. Celles-ci doivent inclure la participation des femmes, des veuves et des membres influents de la société, elles doivent prendre en compte la dimension de genre et répertorier les principaux modes d’occupation dans le droit coutumier. Ainsi, le Ghana transfère progressivement la gestion des terres coutumières du gouvernement aux systèmes coutumiers. Des Secrétariats de la terre coutumière ont été créés pour répondre aux demandes de parcelles à bâtir formulées par des nouveaux résidents. Ces organismes assurent un système structuré de distribution de terres, ils enregistrent les droits sur la terre, effectuent des levés topographiques, rédigent des baux, gèrent les opérations financières et facilitent l’enregistrement. Une indemnisation est accordée aux personnes privées de leurs terres agricoles dans le cadre de l’attribution de terrains. Une partie des revenus fonciers finance les infrastructures communautaires. Voir : ONU-Habitat, Garantir un accès sûr à la terre pour tous (en anglais), 2008.
    • Les rédacteurs qui décident d’enregistrer les terres coutumières doivent faire preuve de prudence en accordant des titres de propriété individuels car cela peut être coûteux, compliqué et avoir des effets déstabilisateurs. Ils doivent plutôt envisager une formalisation graduelle des terres coutumières en augmentant les droits d’occupation au fil du temps tout en évaluant simultanément des approches adaptées à long terme. ONU-Habitat, Garantir un accès sûr à la terre pour tous (en anglais), 2008.

     

     

    Terres appartenant à l’État

    • Le législateur doit prendre en compte les besoins des veuves et de toutes les femmes dans l’administration des terres appartenant à l’État. Elles doivent être consultées tout au long des politiques de développement, de mise en œuvre et d’évaluation de l’attribution de terres. Le législateur doit prendre en considération le contexte et les pratiques coutumières lors de la formulation d’un cadre. C’est ainsi que désigner un « ménage » comme unité bénéficiaire de redistribution de terres peut exclure les femmes dans le cas où les hommes sont considérés comme les chefs de famille traditionnels ou lorsque les politiques publiques ne prennent pas en compte les ménages dirigés par une femme ou dirigés conjointement. Les politiques publiques doivent reconnaître les femmes, quelle que soit leur situation matrimoniale, comme un groupe bénéficiaire spécifique.
    • Le législateur doit veiller à ce que les femmes aient accès au crédit et à des prêts appropriés dans ces cas. Par exemple, lorsque l’État conserve la propriété de la terre et accorde aux individus un droit d’usufruit, les femmes, y compris les veuves, peuvent rencontrer plus de difficultés que les hommes. Dans le cas où des femmes indigentes ont peu d’accès au crédit, l’absence de titre de propriété de la terre qu’elles cultivent signifie qu’elles n’ont aucune garantie à fournir et par conséquent peu recours à des prêts. Ceci est particulièrement vrai dans les régions où les femmes ne peuvent accéder au crédit et aux prêts que par l’intermédiaire d’un parent de sexe masculin.

     

     

    ÉTUDE DE CAS :

    les politiques publiques doivent prendre en compte tous les besoins des bénéficiaires et y répondre. Le Botswana a accordé aux indigents des Certificats de droits, qui leur donnent la sécurité d’occupation et évitent les procédures complexes d’enregistrement. Dans le cadre de ce projet, le gouvernement possédait la terre urbaine et accordait aux titulaires de ces certificats le droit de construire une habitation sur cette terre. Accorder des droits limités avait également des conséquences sur les capacités économiques des bénéficiaires : les femmes ne pouvaient pas utiliser leur habitation comme garantie pour avoir accès au crédit et elles ne pouvaient pas louer des pièces pour améliorer leurs revenus. Voir : Katalin Komjathy et Susan E. Nichols, L’accès des femmes à la terre – Lignes directrices de la FIG (en anglais et en russe), Fédération internationale des géomètres (citation omise).

     

    ÉTUDE DE CAS :

    la législation doit veiller à ce que les femmes aient une possibilité égale de bénéficier des programmes d’attribution de terres en prenant en compte leurs besoins spécifiques et le contexte. Le législateur peut avoir à adopter des quotas, des politiques publiques spéciales et des mécanismes administratifs pour garantir aux femmes un accès équitable à la terre. Au Zimbabwe, la réforme agraire accélérée consistait à prendre la terre des propriétaires blancs pour la redistribuer à d’autres Zimbabwéens. Ce processus a été entaché de violence, de favoritisme et de corruption. L’attribution a été faite aux chefs de famille, le plus souvent des hommes. Lorsque le chef de famille était une veuve, elle pouvait recevoir de la terre si elle avait de jeunes enfants et si les chefs locaux considéraient qu’elle avait la capacité physique de cultiver 4,8 hectares. Or, cette condition n’était pas prévue pour les chefs de famille de sexe masculin. Si toutefois les chefs locaux estimaient que la veuve était trop âgée ou que ses enfants étaient adultes, elle ne recevait qu’un hectare. Les divorcées étaient exclues car on s’attendait à ce qu’elles quittent la terre pour vivre avec leur père ou leur famille, conformément à la coutume. Voir : Bill Derman, Après la réforme agraire accélérée du Zimbabwe : observations préliminaires sur le proche avenir des efforts du Zimbabwe pour résister à la mondialisation, 2006 (en anglais). Qui plus est, la politique suivie ne disposait pas des infrastructures ni des objectifs nécessaires pour garantir un accès équitable aux femmes. Bien que le gouvernement ait annoncé un quota de 20 % de femmes bénéficiaires du programme, il n’a pas mis en place les mécanismes administratifs nécessaires pour atteindre cet objectif. Voir : Human Rights Watch, Zimbabwe : La réforme agraire accélérée (en anglais), 2002.

     

    Pratique encourageante : en Éthiopie, où toute la terre appartient à l’État, le gouvernement a délivré des Certificats fonciers à près de six millions de ménages dans l’intention d’améliorer la sécurité d’occupation, de promouvoir les droits des femmes et d’améliorer l’exploitation durable de la terre. Des Comités locaux d’administration de la terre, comprenant au moins une femme, ont participé à la mise en œuvre de l’enregistrement des terres et de la délivrance des certificats dans les villages. Ces documents devaient comporter le nom du mari et de la femme, leur photographie et des plans. Ces Comités doivent avoir une représentation féminine accrue, ils doivent recevoir une formation de sensibilisation aux questions de genre et avoir une présence au niveau des quartiers et des villages. Toutefois dans l’ensemble le processus de certificats fonciers a été peu coûteux, rapide et transparent. Les femmes estimaient en général que ces certificats conjoints avaient amélioré leur situation socioéconomique. Voir : ONU-Habitat, Garantir un accès sûr à la terre pour tous (en anglais), 2008 ; ONU-Habitat, L’enregistrement de la terre en Éthiopie : effets initiaux pour les femmes, (en anglais), 2008 ; IFPRI, Approches encourageantes pour répondre aux besoins des travailleuses agricoles pauvres (en anglais), 2008.

     

    • Le législateur doit prendre en considération que les questions de genre peuvent se croiser avec d’autres facteurs, comme l’ethnicité, ce qui aggrave la vulnérabilité. Dans un rapport sur les violations des droits des Oromos en Éthiopie, les personnes interrogées ont raconté comment des groupes ethniques se sont installés sur les terres des Oromos et décrit les conflits ethniques et la destruction de la base foncière des Oromos. Les récits illustraient la perception que le gouvernement réinstallait des personnes selon leur groupe ethnique à l’intérieur de l’Éthiopie, au détriment des Oromos. Le transfert des Oromos déstructure leur base foncière traditionnelle, crée une pénurie réelle ou perçue de ressources, et exacerbe des problèmes environnementaux comme la sécheresse. Les personnes interrogées ont affirmé que, en particulier à proximité des villes, le gouvernement éthiopien avait pris la terre de paysans oromos, qui ont ainsi été déplacés et dont plusieurs se sont retrouvés à la rue. Le législateur doit prendre en compte les facteurs ethniques, entre autres, qui peuvent avoir des conséquences supplémentaires pour l’accès des femmes, y compris des veuves, à la sécurité d’occupation. Voir : The Advocates for Human Rights, Les droits de l’homme en Éthiopie : le point de vue des Oromos, 2009 (en anglais).