Justice

Dernière modification: October 31, 2010

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Bref aperçu des initiatives de suivi et évaluation dans le secteur judiciaire/juridique

  • Il est clair que les progrès durement acquis dans le domaine de la justice peuvent être fragiles et qu’un suivi vigilant est nécessaire pour s’assurer qu’il en résulte de véritables différences dans la vie des femmes, étant donné tout particulièrement que les systèmes de justice efficaces sont importants pour réduire et prévenir la violence à l’égard des femmes, assurer leur sécurité, mettre fin à l’impunité et punir les auteurs de violences.
  • Il est essentiel de garder à l’esprit deux questions clés lors du suivi et évaluation des interventions dans le secteur judiciaire/juridique : « Les délinquants sont-ils tenus responsables de leurs actes ? » et « La sécurité des femmes est-elle accrue ? ». Les réponses à ces deux questions peuvent diverger, même lorsque les résultats de l’évaluation indique que, du point de vue de la justice criminelle une initiative atteint les objectifs visés, par exemple un accroissement des taux de déclaration.
  • Le suivi et évaluation, lorsqu’il est mené de manière systématique et cohérente, fournit d’importantes informations sur le degré d’efficacité du secteur par rapport aux besoins des victimes. Un système opérant et sensible à ces besoins contribue à ce que justice soit faite pour les victimes, à engager ainsi le processus de guérison et, simultanément, à prévenir de futurs actes de violence. Un système qui n’est pas sensible aux besoins de femmes peut ajouter aux traumatismes subis par celles-ci, les victimiser derechef et les mettre en danger.
  • Le suivi et évaluation doit considérer les éléments qui concourent au rendu effectif de la justice, en tenant compte, par exemple, des connaissances qu’ont les femmes et les filles des droits que leur accorde la loi, des connaissances qu’ont les hommes des droits de femmes et des filles (et des sanctions pour atteintes portées à ces droits), des connaissances qu’ont de leurs obligations juridiques les avocats, les juges, les officiers de police, les prestataires de soins de santé, les dirigeants communautaires et autres parties responsables de l’application de la loi et de la réalisation des droits  et de la conscience qu’ont ceux-ci du fait que la violence à l’égard des femmes est une violation des droits de la personne.
  • Lors de l’élaboration d’un cadre de suivi et évaluation, on commencera par définir clairement le but programmatique de l’intervention, par exemple :
    • Tenir les organismes de l’État responsables de leurs obligations de protéger les femmes de la violence et de punir les agresseurs
    • Renforcer la réponse du secteur juridique aux besoins des survivantes de la violence et sa capacité à prévenir d’autres actes de violence.

Le cadre temporel et l’ampleur des initiatives de suivi et évaluation dans le secteur judiciaire/juridique dépend des buts et des objectifs du programme et de la nature des stratégies et des activités. En dernière analyse, les instances gouvernementales nationales doivent veiller à s’acquitter de leurs obligations de prévenir et de réprimer la violence à l’égard des femmes et des filles et de protéger celles-ci.  Cela comprend l’établissement de systèmes de recueil de données pour assurer un suivi systématique des progrès accomplis à ces fins.

Compte tenu de ce but général, il est impératif d’identifier clairement les objectifs, les besoins de recueil de données et les sources de données disponibles, par rapport aux résultats escomptés.

Sources de données, questions et défis :

  • Le suivi et évaluation au niveau des districts et des communautés exige le recueil et l’assemblage des statistiques de service des postes de police et des tribunaux sur les cas de violence déclarés par les femmes, la réponse de la police et l’évolution des cas (nombre de cas résolus par le retour des femmes chez elles, par des poursuites judiciaires, et par des condamnations ou des remèdes, par exemple).
  • Le secteur de la justice pénale peut recueillir des informations sur les victimes ainsi que sur les auteurs des violences et suivre les cas de victimisations multiples et de récidive.
  • Dans la plupart des pays, toutefois, les statistiques ne sont pas ventilées selon le sexe de la victime et n’indiquent pas les relations entre la victime et l’auteur des violences. Il est donc difficile de se faire une idée exhaustive de l’étendue de la violence à l’égard des femmes. Les pays se distinguent également les uns des autres par leur traitement de la violence à l’égard des femmes en vertu de la loi : certains ont des lois visant spécifiquement la violence domestique tandis que dans d’autres cette forme de violence relève de lois sur l’agression, les coups et blessures, le harcèlement, l’homicide ou autres crimes. Les divers ministères (justice, santé et autres) d’un même pays peuvent également enregistrer le même crime de différentes manières, selon la portée leurs responsabilités.
  • Bien qu’elles rendent compte d’un très faible pourcentage des cas de violence effectifs (à savoir du nombre total de femmes victimes de maltraitance), les statistiques des tribunaux et de la police sont importantes pour comprendre la réaction du système de justice pénale.
  • On notera qu’il arrive fréquemment que ces statistiques ne sont pas recueillies, en particulier dans les régions où les ressources sont rares et où il n’y a pas de systèmes en place pour documenter les affaires et assurer leur suivi. Dans ces cas, les chercheurs, les groupes de femmes et les entités qui s’intéressent à la réponse à la violence à l’égard des femmes doivent d’abord surmonter les obstacles bureaucratiques et autres qui peuvent s’opposer à l’accès aux registres et aux dossiers (en satisfaisant également aux critères de respect de la vie privée et de la confidentialité), avant de pouvoir consulter les documents existants où ils trouvent des informations incomplètes et de procéder eux-mêmes à l’analyse des données.
  • Outre les statistiques de service, il est également essentiel pour évaluer les efforts déployés dans ce secteur de disposer de données qualitative sur la perception qu’ont les femmes de la réactivité du secteur juridique/judiciaire et de sa capacité à leur fournir des services effectifs et appropriés, ainsi que sur le niveau de confort de la part du personnel de ce secteur devant le traitement des cas de violence à l’égard des femmes et de la sensibilité de ce même personnel aux difficultés auxquelles font face les survivantes et les victimes.

Suivi et évaluation des initiatives du secteur judiciaire/juridique au niveau national

Au niveau national, les efforts de suivi et évaluation portent sur le degré d’exercice de la diligence requise de la part de l’État et des autres acteurs clés pour s’acquitter de leur obligation de prévenir et de réprimer les actes de violence à l’égard des femmes et des filles et de protéger celles-ci.

Le suivi, à ce niveau, doit se concentrer sur la présence ou l’absence des éléments clés suivants et sur leur fonctionnement ou leur absence de fonctionnement :

1. Les différentes formes de violence à l’égard des femmes et des filles sont-elles traitées ?

La violence à l’égard des femmes et des filles se produit dans les lieux publics comme privés. Elle se présente sous différentes formes allant de la violence domestique au viol, en passant par la torture psychologique, le commerce d’êtres humains, l'exploitation sexuelle et les pratiques dangereuses, entre autres. Les actes de violence se produisent dans différents lieux (à la maison, dans la rue, à l'école, sur le lieu de travail, lors de situations conflictuelles) et touchent des groupes représentatifs (des femmes vivant en milieu rural/urbain, des riches/pauvres, des jeunes/adultes, des immigrées, des personnes déplacées, des autochtones, des personnes handicapées, des femmes atteintes du virus du SIDA). Pour garantir une réponse efficace, il faut que les lois, les politiques, les services et les efforts de collecte des données reconnaissent et traitent les différentes manifestations de la violence, et adaptent les stratégies en fonction de la forme et de la compréhension des contextes spécifiques dans lesquels la violence apparaît.

2. Les systèmes de collecte des données, d’analyse et de dissémination sont-ils en place ?

Le développement de politiques, de programmes et de réponses viables dépend de la fiabilité des données. Sont incluses les informations sur : la prévalence, les causes, les victimes et les auteurs de violence à l’égard des femmes et des filles ; l’impact des interventions et la performance du secteur public en termes d'accès aux services de santé par exemple, et de réponses des services de police et des services juridiques ; les attitudes, les comportements et les expériences des hommes, des femmes et des jeunes issus des différents groupes de population et la manière dont ils perçoivent le problème dans leur société ; le coût économique et social de la violence à l’égard des femmes et des filles. Ces données sont essentielles pour mesurer la progression des initiatives de lutte contre la violence, développer des stratégies efficaces et allouer des budgets.

3. Les politiques et les programmes reflètent-ils une approche holistique et multisectorielle ?

Pour répondre à la violence à l’égard des femmes et des filles, une réponse multidimensionnelle impliquant les agences gouvernementales, les organisations non gouvernementales et d’autres entités issues de différents secteurs et de différentes disciplines est requise. Outre les institutions qui sont principalement impliquées dans ce type d’efforts (la santé, la sécurité publique, la justice, le ministère des Affaires féminines, par exemple), les autres acteurs-clés, comme les établissements scolaires, les employeurs, les organisations syndicales, les médias, le ministère des Finances et le secteur privé dans le cadre de la responsabilité civique des entreprises, doivent être inclus. Les interventions doivent comprendre les services et les systèmes d’orientation pour les  victimes de violence, ainsi que des efforts de prévention plus importants axés sur la mobilisation sociale et communautaire pour la « tolérance zéro » et l’égalité des sexes. Le soutien holistique signifie la prise en charge de l'intégralité des besoins et des droits des femmes et des filles, ce qui comprend la garantie de la sécurité, de l’accès aux services de santé, aux services juridiques et aux recours judiciaires ainsi qu’à la sécurité économique pour elles-mêmes, leurs enfants et les autres personnes qu’elles ont à leur charge.

4. Des « services de première ligne » d’urgence sont-ils disponibles et accessibles ?

Les personnes ayant été victimes de violences sexistes ont besoin d’une assistance « de première ligne » immédiate de la police et des services de santé et d’aide juridique. Des réponses à plus grande échelle et à plus long terme étant développées, tous les pays doivent s’assurer que les normes minimales[1] permettent de répondre aux besoins d’urgence. Selon le contexte national, ceci devra comprendre : la garantie de la sécurité et d’une protection adéquate pour les victimes ; un accès universel à au moins une ligne d’assistance nationale gratuite, disponible 24 heures sur 24, pour signaler les abus et les situations mettant la vie en danger, où les conseillers sont formés et savent vers qui diriger les appelants ; un foyer pour 10 000 habitants offrant un hébergement d’urgence sécurisé, des conseils qualifiés et toute autre assistance ; un centre de défense et d’orientation pour 50 000 femmes qui assure une intervention en cas de crise aux victimes ; un centre en cas de viol pour 200 000 femmes ; et un accès universel à des soins de qualité pour les cas de viol (test de grossesse, contraception du lendemain, prophylaxie post-exposition pour éviter la contraction du virus du SIDA et traitement contre les infections sexuellement transmissibles, traitement des blessures et soutien psychosocial). Ces services ne doivent pas dépendre du fait que la victime ait ou non signalé la violence aux services de police et doivent être suivis par une assistance médicale, juridique, psychosociale, éducative et économique à long terme.

5. La législation nationale est-elle adaptée et conforme aux normes en matière de droits de l’homme ?

Les lois et leur application sont essentielles pour éradiquer l’impunité. Elles définissent des limites pour les normes et les comportements publics. Elles affirment les droits de chacun et délimitent les devoirs et les obligations de ceux qui ont la responsabilité de les faire appliquer. Les lois luttant contre la violence doivent être complètes et faire en sorte d’empêcher, de répondre et de punir toute forme de violence à l’égard des femmes et des filles. Les droits des femmes et des filles doivent être de la plus haute importance dans toutes les lois et les politiques et dans tous les programmes, y compris le droit qu’elles ont de bénéficier d’une sécurité personnelle, de confidentialité, d’être informées et de pouvoir décider seules, d’avoir accès aux services sociaux et aux services de santé ainsi qu’à la justice. Ceci comprend également les dispositions légales protégeant certains droits permettant de définir si une femme est en mesure de s’affranchir d’une situation de violence, c’est-à-dire les droits d’une femme à assumer la garde d’un enfant ; les droits économiques, de propriété, fonciers et d’héritage ; la nationalité et le statut d’immigrant. Que ce soit le système juridique officiel ou coutumier qui prévale, il doit soutenir les droits des femmes et des filles. Les lois et leur application doivent respecter les normes internationales et régionales en matière de droit de l’homme, telles qu’elles sont définies dans différents accords, conventions et mécanismes.

6. Les décrets, les réglementations, les protocoles définissent-ils les responsabilités et les normes ?

Les normes explicites doivent définir la mise en œuvre et le contrôle des lois, des politiques et des programmes via différents instruments et procédures qui les renforcent et leur donnent un caractère officiel. Les en œuvre en attribuant des rôles et des responsabilités spécifiques aux ministères compétents. Les protocoles, inter et transectoriels, peuvent fournir des directives importantes aux fonctionnaires et aux prestataires de services et définir les normes en matière d’exploitation et de performance. Ces normes peuvent également servir de point de référence pour le suivi de la progression et de la responsabilisation ainsi que pour la mise en œuvre d’améliorations. Les protocoles et les procédures doivent être alignés sur les droits de l’homme disponibles et recommandés adoptés à l’échelle internationale, les normes éthiques et les normes en matière de fourniture de service.

7. Existe-t-il un plan d’action national et des politiques-clés mis en œuvre et en cours d’application ?

Les plans d’action nationaux axés sur la réponse à la violence à l’égard des femmes et des filles peuvent être des instruments utiles pour la mise en œuvre des ressources institutionnelles, techniques et financières requises pour des réponses coordonnées et multisectorielles. Ils peuvent établir des mécanismes pour la responsabilisation et peuvent clarifier les responsabilités institutionnelles. Ils peuvent également aider à surveiller la progression des cibles spécifiques. Les ministères en charge de la coordination (souvent les mécanismes féminins) ont besoin d’une assistance politique aux plus hauts niveaux, ainsi que d’une assistance institutionnelle et financière adéquate pour mener à bien cette tâche complexe. La garantie que ces actions servant à répondre à la violence à l’égard des femmes et des filles sont intégrées dans d’autres politiques et des plans de financement peut également offrir des lieux stratégiques pour renforcer les efforts et sécuriser les budgets. Parmi les exemples, citons la diminution de la pauvreté, les stratégies de développement, les plans nationaux et les réformes sectorielles en matière d’éducation, de santé, de sécurité, de justice, de SIDA, de consolidation de la paix et de reconstruction après les conflits.

8. Des ressources suffisantes sont-elles régulièrement fournies pour l’application des lois et la mise en œuvre des programmes ?

Les politiques et les lois sont trop souvent adoptées sans que le financement adéquat soit fourni pour leur mise en œuvre. Les budgets doivent être évalués pour s’assurer qu’ils répondent aux besoins de la population, qu’ils sont correctement répartis en fonction des zones géographiques, qu’ils garantissent l’équité et que les femmes et les filles puissent en bénéficier. Les contreparties financières doivent être basées sur le calcul des coûts et comprendre des contreparties périphériques, mais importantes, comme une assistance médicale et juridique gratuite et une aide au transport afin que les femmes et les filles puissent avoir accès à des services juridiques et autres et qu’elles bénéficient d’une réintégration socioéconomique. L’assistance financière aux victimes peut être possible grâce à des plans innovants comme les fonds d’affectation spéciale auxquels l’État et les autres acteurs (individus, organisations et donateurs privés) peuvent contribuer. Les ressources doivent être disponibles pour garantir la capacité de développement des différents secteurs et des professionnels qui sont chargés de faire appliquer les lois et de mettre en œuvre les programmes. Un financement public adéquat doit être accordé aux organisations non gouvernementales et les groupes féministes doivent gérer les sources d’expertise et de services pour les victimes pour leurs tâches et leurs contributions.

9. Les efforts sont-ils axés sur l’autonomisation des femmes et la mobilisation de la communauté ?

Il y a trop souvent une tendance à la fourniture de politiques et de services sans engagement adéquat du public via des approches d’autonomisation permettant aux personnes de demander et d’avoir accès à ces services et de chercher des responsabilités. Le réel changement durable pour mettre fin à la violence à l’égard des femmes et des filles doit être axé sur le niveau local et la communauté où les actes d’abus se produisent et sont trop souvent tolérés. Les stratégies doivent autoriser les femmes et les filles à faire valoir leurs droits de justice, de protection et d’assistance ; les informer de leurs droits et de leurs obligations gouvernementales et garantir la collaboration avec les centres et les groupes de défense des femmes, ainsi qu’avec les jeunes, les hommes et les autres organisations engagées dans l’égalité des sexes. L’éducation publique de masse et les campagnes de sensibilisation au problème, y compris via les médias locaux et nationaux, sont des éléments importants. La mobilisation de la communauté sur l’égalité des sexes et la non-violence est essentielle pour enrayer la violence à l’égard des femmes et des filles, notamment au sein de la population masculine, des jeunes, des groupes religieux et des groupes stratégiques.

10. Les systèmes de surveillance et de responsabilisation sont-ils fonctionnels et participatifs ?

Les évaluations régulières et participatives des gouvernements au niveau local et national, en partenariat avec les organisations féministes et les autres organisations de la société civile, permettent de garantir que les politiques et les programmes fonctionnent comme prévu et souligner les opportunités d’amélioration. Ces évaluations peuvent comprendre des rapports de progression annuels présentés au parlement par les ministères sectoriels, l’établissement d’observatoires nationaux et locaux, des mécanismes de contrôle indépendants comme les médiateurs, la collaboration avec les médias pour diffuser des informations concernant la progression et les carences, et des évaluations périodiques de l’application des lois et de la mise en œuvre des programmes. Les politiques et les programmes de lutte contre la violence doivent comporter des cibles et un calendrier clairement définis afin que leur efficacité puisse être mesurée et évaluée. Les efforts de surveillance nationaux doivent également être liés à des obligations de faire régulièrement des rapports de la part des États parties au comité CEDAW et aux autres organisations ayant vu le jour suite à un traité international.

Ces points sont extraits de la brochure d’UNIFEM intitulée Cadre national de responsabilisation pour mettre fin à la violence à l’égard des femmes et des filles : liste des 10 points-clés, qui est disponible et téléchargeable en anglais, arabe, espagnol, français et russe.

Mini-étude de cas : Recueil systématique de données par le ministère de la Justice des États-Unis

Le Bureau des statistiques criminelles du ministère de la Justice des États-Unis rassemble et agrège les données de la National Crime Victimization Survey (NCVS), l’une des plus vastes enquêtes menées en continu auprès des ménages américains, qui comprend des données sur les homicides, les agressions domestiques, les viols et les agressions sexuelles, ainsi que celles des Uniform Crime Reports (URC) du Federal Bureau of Investigation (FBI), compilées d’après les rapports de police mensuels ou les comptes rendus individuels de crimes communiqués directement au FBI ou aux organismes d’État centralisés, qui comprennent des données sur les homicides, les viols et les agressions. Ceci représente l’une des activités de recueil de données de niveau national les plus systématiques et les plus complexes.

 

Pour de plus amples informations sur la National Crime Victimization Survey et pour accéder aux statistiques, voir le Bureau of Justice.

Suivi et évaluation des initiatives du secteur judiciaire/juridique au niveau local

Même lorsque des lois et des politiques appropriées et sans ambigüité sur la violence à l’égard des femmes sont appliquées et doublées d’une volonté sans faille de la part des autorités nationales/centrales de veiller au respect des droits de la personne, il peut se présenter au niveau local plusieurs obstacles qui empêchent les femmes d’accéder véritablement à la justice et les praticiens du secteur juridique d’agir pour prévenir la commission d’actes de violence.

Le suivi de l’accès à la justice au niveau local doit comprendre une évaluation des éléments suivants :

  • Infrastructure/produits appropriés pour prendre en charge les victimes et les interroger.
  • Politiques et protocoles clairs pour le traitement des cas de violence domestique et sexuelle.
  • Formation de tout le personnel (justice, secteur juridique, sécurité/police, etc.) sur le genre, la violence à l’égard des femmes, ses obligations juridiques et la bonne mise en œuvre des lois politiques et protocoles.
  • Élaboration de réseaux d’orientation et établissement d’une réponse coordonnée.
  • L’évaluation des initiatives pourra porter sur les taux de déclaration, les taux de poursuites, les taux de condamnation, les perceptions des femmes relatives à la qualité des services fournis et à la satisfaction de leurs besoins, les obstacles s’opposant à l’accès, et les connaissances, attitudes et pratiques de la police et des autres acteurs du secteur juridique concernant le genre et la violence à l’égard des femmes.
  • Les mécanismes de la justice formelle sont hors de portée d’un grand nombre de femmes qui dépendent des systèmes de justice coutumiers ou informels pour résoudre les problèmes, notamment en rapport avec la violence. Les femmes de milieu rural et des zones isolées qui ont difficilement accès aux centres urbains ne peuvent vraisemblablement s’adresser qu’aux chefs de village ou aux initiatives de police à base communautaire, ce qui exige des mesures d’adaptation et d’innovation pour les méthodes et les indicateurs de suivi et évaluation.

ÉTUDE DE CAS : Évaluations des systèmes de justice informels en Mélanésie et au Timor oriental

Ces systèmes sont bien plus accessibles pour la majorité des gens et, s’ils sont appuyés par des activités de renforcement des capacités dans les domaines du genre et des droits de la personne, offrent d’importantes possibilités de réduction de la violence à l’égard des femmes.

La justice à base communautaire, la police de proximité, la justice réparatrice, la médiation de la paix et la résolution des conflits font l’objet d’efforts de promotion enthousiastes de la part des instances gouvernementales, des bailleurs de fonds et des organisations de la société civile. Toutefois, si elles ne comprennent pas des mesures visant spécifiquement à égaliser le terrain, ces approches peuvent aller à l’encontre de la justice pour les femmes.  À Vanuatu, le programme des Avocats masculins du Centre des femmes a dispensé aux chefs de villages et autres dirigeants de sexe masculin des formations ciblées qui ont donné des résultats encourageants. Les chefs qui conviennent de respecter certaines normes de conduite personnelle sont inclus dans le réseau de plaidoyer masculin, assistant à des sessions de mise à jour et œuvrent avec leurs comités locaux de lutte contre la violence à l’égard des femmes.

Le Timor oriental offre le meilleur exemple de la région en matière de suivi des expériences des femmes dans les systèmes de justice formel et informel. Son programme de suivi du système judiciaire, établi en 2001 par une ONG est-timoraise, a produit des rapports qui ont été utilisés pour plaider en faveur de réformes, notamment de mesures visant à accroître le nombre de femmes élues auprès des organismes à pouvoir décisionnel (conseils de suco [administration locale] et d’aldeia [village]) et du Décret-loi de 2004 sur la violence domestique. En vertu de cette loi, les chefs de conseils de suco se voient attribuer parmi leurs fonctions celles de prévenir la violence domestique, d’appuyer et de protéger les victimes et de châtier et de réhabiliter les coupables. Les données issues du suivi de sa mise en œuvre seront utilisées lors de formations dispensées aux conseils de suco.

Les organisations locales de défense des droits des femmes, lorsqu’elles sont solides, peuvent assurer une surveillance efficace des systèmes de justice traditionnelle et de justice réparatrice. Certains comités locaux de lutte contre la violence à l’égard des femmes jouent ce rôle à Vanuatu, appuyés par leur organisation nationale. L’expérience de certaines organisations de femmes à base communautaire des hautes terres de la Papouasie-Nouvelle-Guinée (telles que celle des Femmes de Kup pour la paix) montre combien ce travail peut être difficile, voire dangereux. La participation à des réseaux de plus grande ampleur, le renforcement des capacités des dirigeant(e)s et l’apport de ressources peuvent accroître la durabilité et le succès des activités.

On se gardera toutefois de s’en remettre exclusivement aux ONG pour assurer le suivi et les systèmes de justice devraient suivre les effets des initiatives sur les femmes et en faire rapport dans le cadre de leurs activités ordinaires.

Source : AusAid, Office of Development Effectiveness, Australian Government. 2008. Violence Against Women in Melanesia and East Timor: Building on Global and Regional Promising Approaches. Disponible en anglais.

Source: PATH, 2010.

Indicateurs

L’initiative MEASURE Evaluation, à la demande de l’Agence des États-Unis pour le développement international (USAID) et en collaboration avec l’Interagency Gender Working Group, a compilé un ensemble d’indicateurs pour le secteur de la justice.  Les indicateurs ont été conçus pour mesurer les performances et les réalisations des programmes au niveau communautaire, régional et national au moyen de méthodes quantitatives. Bien que beaucoup des indicateurs aient été utilisés sur le terrain, on notera qu’ils n’ont pas nécessairement été testés dans de multiples contextes. Pour procéder à un examen complet des indicateurs, y inclus de leur définition, on trouvera un outil et des instructions pour ce faire dans la publication Violence Against Women and Girls: A Compendium of Monitoring and Evaluation Indicators.

Les indicateurs compilés pour le secteur de la justice sont les suivants :

  • Proportion d’unités d’application de la loi se servant d’un protocole national établi pour les plaintes relatives à la violence à l’égard des femmes et des filles

Ce que cet indicateur mesure : Cet indicateur mesure le nombre d’unités d’application de la loi traitant les plaintes relatives à la violence à l’égard des femmes et des filles selon un protocole conforme à des normes établies au niveau national.

  • Nombre d’agents chargés de l’application de la loi formés pour répondre aux incidents de violence à l’égard des femmes et des filles selon un protocole établi

Ce que cet indicateur mesure : Cet indicateur d’extrant suit le nombre d’agents chargés de l’application de la loi ayant été formés pour répondre aux incidents de violence à l’égard des femmes et des filles en se conformant à un protocole établi.

  • Nombre de plaintes pour violence à l’égard des femmes et des filles déposées auprès de la police

Ce que cet indicateur mesure : Cet indicateur mesure combien de plaintes pour violence à l’égard des femmes et des filles ont été déposées et enregistrées par la police au cours d’une période donnée.

  • Proportion de cas de violence à l’égard des femmes et des filles ayant fait l’objet d’une enquête de police

Ce que cet indicateur mesure : Cet indicateur mesure la proportion de cas de violence à l’égard des femmes et des filles ayant fait l’objet d’une enquête de police au cours d’une période donnée.

  • Proportion de cas de violence à l’égard des femmes et des filles ayant fait l’objet de poursuites judiciaires

Ce que cet indicateur mesure : Cet indicateur mesure l’efficacité du système juridique en suivant la proportion de cas déclarés de violence à l’égard des femmes et des filles ayant fait l’objet de poursuites judiciaires.

  • Proportion de poursuites judiciaires pour violence à l’égard des femmes et des filles ayant abouti à une condamnation

Ce que cet indicateur mesure : Cet indicateur mesure l’efficacité du système juridique en suivant la proportion de cas déclarés de violence à l’égard des femmes et des filles ayant à la fois fait l’objet de poursuites judiciaires et abouti à une condamnation.

  • Proportion de femmes qui  connaissent une organisation locale fournissant des services d’aide juridique aux survivantes de violence à l’égard des femmes et des filles

Ce que cet indicateur mesure : Cet indicateur mesure la proportion de femmes qui connaissent l’existence d’une organisation fournissant des services d’aide juridique aux survivantes de violence à l’égard des femmes et des filles. Les femmes ne doivent pas nécessairement connaître l’organisation spécifique, mais doivent avoir assez de renseignements pour accéder aux services en cas de besoin.

Outre les indicateurs internationalement comparables précédemment indiqués, en cours d’élaboration pour suivre les réponses des États à la violence à l’égard des femmes, on peut citer à titre d’exemple les indicateurs suivants :

The Report on Indicators on Violence against Women and State Response [Rapport sur les indicateurs de violence à l’égard des femmes et la réponse des États], par le Rapporteur spécial des Nations Unies sur la violence contre les femmes, ses causes et ses conséquences (A/HRC/7/6, 29 janvier 2008), énonce un ensemble d’indicateurs, correspondant aux normes relatives aux droits de la personne figurant dans la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes et dans la Déclaration sur l’élimination de la violence contre les femmes.

Le cadre de suivi du rapport du Conseil de l’Europe (p. 47) établi pour évaluer la mise en œuvre et le suivi de la Recommandation Rec(2002)5 du Comité des ministres des États membres sur la protection des femmes contre la violence (EG-S-MV).

 

Exemples de rapports de suivi et évaluation dans le secteur de la justice :

Different Systems, Similar Outcomes? Tracking Attrition in Reported Rape Cases in 11 European Countries [Systèmes différents, effets semblables ? Suivi de l’attrition des cas de viol déclarés dans 11 pays d’Europe] (Lovett and Kelly, 2009). Disponible en anglais.

Responding to sexual violence: Attrition in the New Zealand Criminal Justice System [Réponse à la violence sexuelle : Attrition dans le système de justice pénale de la Nouvelle-Zélande] (Triggs and Mossman, Jordan and Kingi, 2009).  Disponible en anglais.

Implementation of the Bulgarian Law on Protection against Domestic Violence [Application de la loi bulgare sur la protection contre la violence domestique] (The Bulgarian Gender Research Foundation et Advocates for Human Rights, 2008).  Disponible en anglais.

Judicial System Monitoring Programme [Programme de suivi du système judiciaire] (Women’s Justice Unit, Timor oriental). Les rapports sont disponibles en anglais, en bhasa et en portugais.

Tracking Rape Case Attrition in Gauteng: The Police Investigation Stage [Suivi de la réduction des cas de viol au Gauteng : le stade des enquêtes de la police] (Sigsworth, Vetten, Jewkes and Christofides/The Centre for the Study of Violence and Reconciliation, 2009).  Disponible en anglais.

Tracking Justice: The Attrition of Rape Cases through the Criminal Justice System in Gauteng [Suivi de la justice : Réduction des cas de viol au Gauteng : le rôle du système de justice pénale] (Sigsworth, Vetten, Jewkes, Loots, Dunseith and Christofides/The Centre for the Study of Violence and Reconciliation, 2008).  Disponible en anglais.

Étude de cas : Suivi de la mise en œuvre de la Loi de 2005 sur la violence domestique en Inde

La Lawyers Collective Women’s Rights Initiative [Initiative pour les droits des femmes du Collectif d’avocats] a produit plusieurs rapports de suivi et évaluation de la mise en œuvre de la Loi de protection contre la violence domestique, entrée en vigueur en 2006 en Inde. Les objectifs visés étaient les suivants :

  • Dresser une carte de l’infrastructure établie par les autorités des États fédérés pour la mise en œuvre de la loi;
  • Rassembler les données concernant l’expérience des parties prenantes ayant recours à cette infrastructure pour offrir des recours aux victimes de la violence domestique;
  • Tirer des conclusions préliminaires concernant l’effet de cette infrastructure sur la mise en œuvre de la loi.

En vue d’atteindre son objectif, l’évaluation a cherché à répondre à une série de questions, notamment :

  • Dans quelle mesure les lacunes de l’infrastructure ont-elles été comblées ?
  • Quelles sont les différentes approches adoptées par les États pour mettre en place l’infrastructure nécessaire pour se conformer aux dispositions de la loi ?
  • Dans quelle mesure les États sont-ils parvenus à établir un mécanisme de réponse coordonné multi-organisations tel que l’envisage la loi ?
  • Comment la jurisprudence évolue-t-elle sous l’effet de la loi ?
  • Y a-t-il eu des changements dans le nombre de poursuites intentées au titre des dispositions pertinentes du droit pénal (Section 498A) ?

Une double démarche a été adoptée pour appréhender le fonctionnement des organismes établis pour mettre en œuvre la loi de 2005 :

  • Recueil de données primaires sur l’infrastructure établie et sur les mesures prises par l’État en vue d’une mise en œuvre effective de la loi, auprès des principaux services de chaque État, tels que ceux du ministère du développement de la femme et de l’enfant et du ministère du bien-être social;
  • Visites sélectives sur le terrain pour examiner le fonctionnement réel des organismes, au moyen d’interviews avec les diverses parties prenantes, notamment les officiers de protection et les prestataires de services, et les représentants de refuges et d’établissements de santé, d’organisations de femmes, d’organisations de la société civile, d’ONG, de la profession juridique, des commissions d’État chargées des affaires féminines et des autorités de services juridiques.

Rapports du Collectif d’avocats sur son Initiative pour les droits des femmes :

Staying Alive: First Monitoring and Evaluation Report on the Protection of Women from Domestic Violence Act, 2005 [Rester en vie : Premier rapport de suivi et évaluation sur la Loi relative à la protection des femmes contre la violence domestique de 2005] (Lawyers Collective Women’s Rights Initiative, 2007). Disponible en anglais.

Staying Alive: Second Monitoring and Evaluation Report on the Protection of Women from Domestic Violence Act, 2005 [Rester en vie : Deuxième rapport de suivi et évaluation sur la Loi relative à la protection des femmes contre la violence domestique de 2005] (Lawyers Collective Women’s Rights Initiative, 2008).  Disponible en anglais.

Staying Alive: Third Monitoring and Evaluation Report on the Protection of Women from Domestic Violence Act, 2005 [Rester en vie : Troisième rapport de suivi et évaluation sur la Loi relative à la protection des femmes contre la violence domestique de 2005] (Lawyers Collective Women’s Rights Initiative, 2009).  Disponible en anglais.

Staying Alive: Fourth Monitoring and Evaluation Reports on the Protection of Women from Domestic Violence Act, 2005 (Lawyer’s Initiative Women’s Rights Collective, 2010).  Disponible en Anglais.

Staying Alive: Fifth Monitoring and Evaluation Reports on the Protection of Women from Domestic Violence Act, 2005 (Lawyer’s Initiative Women’s Rights Collective, 2012).  Disponible en Anglais.

Staying Alive: Sixth Monitoring and Evaluation Report on the Protection of Women from Domestic Violence Act, 2005 (Lawyer’s Initiative Women’s Rights Collective, 2012). Disponible en Anglais.

 

Exemples d’outils :

Tool for Assessing Justice System Response to Violence against Women, A Tool for Law Enforcement, Prosecution and the Courts to use in Developing Effective Responses [Outil d’évaluation de la réponse du système de justice à la violence à l’égard des femmes. Outil destiné à la police, au ministère public et aux tribunaux pour élaborer des réponses efficaces]. (The Battered Women’s Justice Project and National Resource Center on Domestic Violence, 1998). Cet outil a été créé à l’intention des communautés des États-Unis pour les aider à élaborer des réponses efficaces de la part de la police, du ministère public et des tribunaux dans les cas de violence à l’égard des femmes, mais aussi pour faire fonction de ressource aux fins du suivi de ces réponses. Il contient une série de check-listes de réponses qui soulignent les principaux éléments des bonnes pratiques, décrit les rôles fondamentaux des forces de police, du ministère public et des tribunaux dans la lutte contre la violence à l’égard des femmes, et indique les points sur lesquels les organisations coordonnent leurs activités et collaborent entre elles ainsi qu’avec des programmes de plaidoyer. Il met également en évidence les lacunes en matière d’évaluation des progrès de même que les domaines dans lesquels les réponses pourraient être améliorées. Disponible en anglais.

Court Monitoring Programs [Programmes de suivi des tribunaux] (WATCH, Minnesota, USA).  Ce site donne des informations sur l’objet des programmes de suivi des tribunaux, des instructions sur la façon de mettre en place de tels programmes, sur les points à surveiller et sur les façons de le faire. Disponible en anglais.

Le Women’s Justice Center (Centro de Justicia para Mujeres) [Centre de justice pour les femmes] a élaboré un formulaire d’évaluation de la réponse de la police au viol et aux agressions sexuelles. Ce formulaire est destiné à être utilisé par les victimes, les avocats et les responsables de l’application de la loi pour évaluer les prestations de la police dans les divers cas. Les questions sont réparties en trois catégories : Réponse initiale de la police, interview de la victime et suivi de l’enquête. La plupart des questions portent sur l’interview de la victime par la police ainsi que sur le confort et la sécurité de la victime au cours de l’enquête. Disponible en anglais et en espagnol.

The CEDAW Assessment Tool: An Assessment Tool Based on the Convention to Eliminate All Forms of Discrimination Against Women [Outil d’évaluation de la CEDAW : outil d’évaluation fondé sur la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes (American Bar Association, Central and East European Law Initiative, 2002). Disponible en anglais.